
Le point de vue des experts
Les démarches de la Ville et la demande des habitant·e·s pour faire de la Campagne-Masset un parc public, ne datent pas d’aujourd’hui. Cela fait 60 ans que la question suscite la mobilisation du quartier et l’intervention des pouvoirs publics.
La Campagne-Masset s’inscrit dans un quartier dense et morcelé, scindé par l’Avenue d’Aïre, et enchâssé par l’Avenue de l’Ain et les voies ferrées. Le quartier s’est construit sans véritable cohérence territoriale. Résultat, il est constitué d’ilots, faiblement reliés entre eux. Les infrastructures du quartier isolent plus qu’elles ne relient les habitant·e·s. Paradoxe ultime, le quartier fait dos au Rhône qui est difficile d’accès et peu visible, alors qu’il jouxte le secteur !
Le quartier connaît et connaîtra encore un phénomène de densification massif. Pourtant les espaces public, existant ou planifiés, notamment les espaces verts, sont très peu nombreux et sont de surcroît de faible qualité. Par exemple, le Parc Hentsch est un des endroits les plus chauds du quartier ! Cette rareté des espaces verts, leurs modestes dimensions et leur faible qualité ont des conséquences sur la qualité de vie des habitant·e·s. Les conflits d’usage dans les rares espaces disponibles sont nombreux ce qui entraine des tensions entres les différentes catégories d’habitant·e·s du quartier.
La possibilité d’un parc apparait ainsi comme une nécessité et une opportunité. Les futur.e.s habitant.e.s des prochaines constructions auront besoin d’espaces de fraîcheur et d’espaces de loisirs. Cette opportunité est d’autant plus grande qu’il n’y a rien à faire, le parc existe déjà (contrairement à des projets d’espaces publics tels que le parc public de la Pointe de la Jonction qui se construit sur un espace bétonné).
Les craintes et rêves des habitant·e·s concernant la transformation de la Campagne-Masset en parc public, ainsi que des pistes de solutions.
Les principales craintes exprimées concernent en premier lieu les problèmes de surfréquentation, de sécurité et de gouvernance. Beaucoup d’habitant·e·s craignent une saturation comme sur les berges du Rhône, les nuisances (fumée, bruit) l’insalubrité et les incivilités que pourraient entraîner un trop grand succès du parc. Le coût d’achat et d’entretien suscite également des interrogations, notamment l’entretien de la maison. Enfin, la perte de la biodiversité s’est également exprimée. Des habitant·e·s ont soulevé le risque d’un parc trop artificialisé et la destruction potentielle du milieu naturel.
Des pistes de solution ont été proposées. Pour répondre aux risques liés à la surfréquentation et aux conflits d’usage, créer des zones dédiées (BBQ, zones sans fumée/musique), élaborer un règlement clair et accessible. La possibilité de fermer le parc la nuit, totalement ou partiellement a également été discutée, mais sans faire consensus. Pour répondre aux besoins de qualité de l’espace naturel, les participant·e·s ont proposé de préserver des zones sauvages, limiter les aménagements lourds, sensibiliser à la biodiversité. En termes de gouvernance, différentes possibilités ont été envisagées, par exemple la surveillance par des animateurs·trices, ou une gestion collective entre habitant·e·s et associations locales. Concernant les aménagements, ils pourraient être progressifs et les plus lourds seraient limités. Les équipements légers seraient dans tous les cas privilégiés.
Les rêves et les aspirations s’articulent autour de quatre grands thèmes. Premièrement, que la Campagne Masset devienne un espace de nature et de détente, avec des sentiers, des zones ombragées, des points de vue sur le Rhône et le paysage environnant. Deuxièmement, faire du parc un lieu qui favorise le lien social et la culture, où l’on pourrait y trouver une guinguette ou une buvette, ou un tea room, faire des fêtes de quartier, pouvoir y assister à une projection de cinéma en plein air, participer à des ateliers et, pourquoi pas, s’y marier. Troisièmement, un lieu où se déroulent des activités sportives et éducatives, avec une maison de la créativité et de la biodiversité, un observatoire ornithologique, des ateliers de permaculture, des potagers collectifs. Enfin, le parc de la Campagne-Masset pourrait incarner un patrimoine vivant, notamment en conservant sa vigne et en produisant du vin, en accueillant des marchés agricoles, ou en permettant le maraîchage coopératif.
Pour un parc du XXIe siècle
Cette soirée a permis de dégager quelques enjeux clés autour de la Campagne-Masset. C’est une opportunité de créer un parc du XXIe siècle, un parc durable, inclusif et expérimental qui permette de réinventer le lien social dans le quartier et le rapport à la nature. Prévenir les conflits d’usage passe par une gouvernance partageée. Le défi est d’articuler biodiversité, convivialité et intimité.
Retrouvez le compte rendu complet de la soirée et l’étude en développement territorial ici :
